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22 09 2007 - Arméniens . Cette minorité installée en Egypte a eu un rôle politique immense au XIXe siècle, de 1810 à 1844.
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Al Ahram 20-9-07 - Voyages
Arméniens . Cette minorité installée en Egypte a eu un rôle politique immense au XIXe siècle, de 1810 à 1844. C’était le thème d’une conférence tenue récemment au consulat de France d’Alexandrie.
Les apports d’une élite
Dans la première moitié du XIXe siècle, la minorité arménienne était loin d’être importante par rapport aux minorités des communautés diverses vivant en Egypte. Néanmoins, cette minorité était politiquement la plus forte. Comment l’explique-t-on ? C’est par le fait du fondateur de l’Egypte moderne, Mohamad Ali, qui s’est appuyé largement sur cette communauté. En effet, ce dernier voulait s’imposer sur ce pays en qualité de gouverneur ottoman et, que, pour cette charge, il lui fallait présenter à la Sublime Porte une caution bancaire émanant d’une « Amira » (version arménisée du titre d’Emir). Aussi pour ce faire, Mohamad Ali alla-t-il faire sa cour à l’Amira arménien, Abraham Karakélian, et l’acquit à sa cause. Lui et ses descendants furent charges pendant la durée du siècle d’être les défenseurs des intérêts des vice-rois, et, plus tard, des khédives d’Egypte auprès de la Sublime Porte.
Mais, de retour au Caire, Mohamad Ali constata que les caisses de la vice-royauté étaient totalement vides. Il demanda des prêts. Le seul qui lui fit confiance, était, une fois de plus, un Arménien, nommé Yghézian Amira Bédrossian, qui lui déclara qu’il mettait à la disposition du pacha « sa bourse et sa vie ». Mohamad Ali fut charmé par le personnage dont il fit pendant les premières années de son règne son conseiller des finances et administrateur de ce qu’on appelait, alors, le trésor privé. Il existait de même entre Mohamad Ali et les Arméniens une affinité essentielle basée sur une communauté de culture et de langue : les intéressés venant de Turquie parlaient le turc, seule langue dans laquelle aimait s’exprimer le pacha. De plus, il leur faisait confiance ... Aussi disait-il volontiers : « Choisissez des Arméniens qui font preuve d’une endurance infatigable et d’un dévouement exemplaire, ils s’acquittent de leurs fonctions avec plus de rigueur et de conscience que d’autres et font avancer les affaires de l’Etat à pas de géant ».
Son amitié pour eux fut toujours fidèle. Même vingt ans après son avènement, Mohamad Ali faisait quérir encore des Arméniens, dont l’éventail des fonctions s’était considérablement élargi.
Le groupe des banquiers, financiers et négociants s’est vu contrebalancé par celui de secrétaires experts, assistants avant de devenir conseillers et ministres. De même, ils furent ouvriers généralement qualifiés, maçons, charpentiers, forgerons, bottiers, tailleurs, sans oublier les orfèvres de l’Arménie de toujours qui ont été sensibles à l’appel du vice-roi de l’Egypte.
Etaient également arméniens, le maître d’hôtel personnel du vice-roi ainsi que son médecin très écouté par lui. Le vice-roi a fait spécialement venir de Constantinople des architectes arméniens pour les charger des somptueuses sépultures tubées destinées aux princes de la famille d’Egypte.
Entré en rebellion
De tous les Arméniens qui, à des niveaux divers, gravitaient autour du vice-roi, Boghos Youssoufian, plus connu sous le nom de Boghos bey Youssouf, a marqué de son empreinte, pendant plus de trente ans le règne de Mohamad Ali. Il fut à la fois son éminence grise et le ministre tous azimuts. Les témoignages
français ne tarissaient pas d’éloges à son sujet. De même les Arméniens disaient de lui « Mohamad Ali était un génie ». Mais celui-ci était un despote, et c’est à Boghos bey que revenait le soin de canaliser ses caprices et ses colères, ses entêtements et ses frasques. En 1825, Boghos bey fut nommé contrôleur des Finances et fit en tant que première mesure nationaliser les douanes. L’importance des revenus douaniers fut ainsi versée à l’Etat. En 1833, il fut nommé ministre des Affaires étrangères et du Commerce puis cumula aussi ceux des Finances, de l’Intérieur et de la Défense. Fait important à signaler :
entre 1839 et 1841, Mohamad Ali fit la guerre à la Turquie, inaugurant ainsi la Question d’Orient.
Boghos bey n’approuvait pas cette campagne. Le pacha étant, ainsi, entré en rébellion contre son suzerain risquant sa tête et son trône. Mais il fut si bien défendu par son ministre qu’il obtint, non seulement de conserver son trône, mais aussi de le conserver à titre héréditaire.
Boghos bey, couvert de gloire, s’éteignit à Alexandrie, début 1844. Le dernier présent qu’ avant de mourir il fit au vice-roi avait pour nom Nubar, son neveu, âgé de dix-huit ans, qui allait vingt ans plus tard devenir Nubar pacha.
En remplacement de Boghos bey décédé en 1844, le vice-roi nomma Artin bey Tcharkian auquel il confia les deux principaux portefeuilles détenus par le défunt : celui des Affaires étrangères et celui du Commerce au sein du Conseil d’Etat. Artin bey mit la tête des jeunes novateurs opposés aux traditionalists et autres Mamelouks hostiles aux idées du progrès.
En 1847, la prépondérance arménienne paraissait intacte. Mais, l’année
suivante, Mohamad Ali tomba malade, l’année d’après, il trépassait. Les protégés n’avaient plus de protecteur. Une question se pose alors : Pourquoi Mohamad Ali, qui était albanais, a-t-il préféré les Arméniens aux Albanais pour constituer un corps d’élite ? Pour Mohamad Ali, les Albanais étaient, peut-être, des soldats, mais la discipline n’était pas leur qualité première.
De plus, la méconnaissance du français les coupait du monde, impropre à toute entreprise de modernisation. Son petit-fils et successeur, Abbass pacha, (1848-1850), s’était juré de mettre les Arméniens à l’écart. En 1850, il destitua de ses fonctions Artin bey Tcharkian. Mais il ne trouva personne
capable de remplir ces fonctions, et, comble d’ironie, fit appel aux Arméniens.
Il confia les Affaires étrangères à Stéphane bey Démirdjian et le Commerce à Arasel bey Nubar, frère du futur grand Nubar. En 1854, Abbass pacha fut assassiné.
Son successeur, Saïd pacha (1854-1863) possédait l’ouverture d’esprit nécessaire pour son rôle. Avec lui, il y eut un retour en grâce des Arméniens.
Stéphane bey resta jusqu’en 1857 à son poste, avant d’être attribué à Nubar pacha. On a dû attendre neuf ans pour ce faire.
Nubar pacha : Né à Smyrne en 1825 et mort à Paris en 1899. Raffiné, il avait le profil du parfait diplomate. Cet aristocrate se doublait d’un révolutionnaire.
En 1863, année où le plus fastueux des vice-rois, Ismaïl, monte sur le trône, marque la promotion éclatante pour Nubar qui devint non seulement le premier Arménien, mais aussi le premier chrétien à recevoir le titre de pacha. Entre 1866 et 1867, Nubar a obtenu de la Sublime Porte trois concessions majeures :
le percement de l’isthme, l’hérédité, le khédiviat. Il occupera quatre fois, pendant seize ans, de 1866 à 1888, le poste de ministre des Affaires étrangères. N’oublions pas aussi qu’il fut et restera lié à la réforme judiciaire qui lui a demandé dix ans d’efforts. Cette réforme remettrait en cause les fameuses capitulations. Il institua les tribunaux mixtes. Il supprima la corvée, le travail obligatoire et la réquisition de milliers de fellahs.
Nubar pacha eut à son actif la mise en place des chemins de fer égyptiens et une réforme inachevée de la police. En 1878, il fut nommé à la présidence du Conseil. Il fut trois fois premier ministre. Il détient les portefeuilles des Travaux publics, de la Justice, du Commerce et de l’Intérieur. En 1895, il prit sa retraite définitive. Il servit l’Egypte pendant cinquante-deux ans sous sept vice-rois.
Le prince Trigane d’Abro, successeur de Nubar pacha, son gendre, fut le cinquième et dernier ministre arménien des Affaires étrangères. Il servit sous le vieux ministre Zulficar pacha. Sa notoriété date de juillet 1882, moment où l’Angleterre accentuait sa pression sur l’Egypte et où Orabi pacha donnait le
coup d’envoi de son insurrection. Le vice-roi Mohamad Tawfiq chargea alors Tigrane d’Abro de négocier avec l’amiral de la flotte anglaise qui croisait en face d’Alexandrie, ses canons pointés sur la ville. Tigrane mena à bien cette mission. Il réussit, accompagné de son ami Ferdinand De Lesseps, à dissuader Orabi pacha de la folie de paralyser le canal par la destruction de ses digues.
Il mettait les intérêts de l’Egypte en premier, à tel point qu’il s’attira le mécontentement de la puissance protectrice. Ce faisant, il barrait la route de la présidence du Conseil pour le restant de ses jours. Le dernier Arménien a été Yakoub Artin pacha, fils d’Artin bey Tcharkian. Sa démission, en 1906, mis en terme définitif au rôle politique des Arméniens en Egypte .
Gisèle Boulad
V.V
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