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29 09 2007 - Alice Tachdjian : "confronto tra armeni e ebrei" per Nouvelles d'Arménie
Alice per Nouvelles d'Arménie, molto interessante per il confronto tra popoli ebrei e armeni.
LE MAS AUX ALOUETTES ET EXODUS’47 - NEWS DU 13-06-2007
http://WWW.quaderniradicali.it/agence/index
L’été a duré longtemps cette année
Et si les mûriers ont jaunis, les figues sont encore vertes.
Refik, le typographe,
Et la fille la plus jeune de Jorghi, le laitier,
Se promènent avec les doigts entrelacés,
Karabè, le charcutier, a déjà allumé les lumières.
Cet arménien ne peut oublier le massacre de son père
Dans les montagnes kurdes.
Mais toi, il t’aime.
Toi aussi tu ne peux les pardonner
Ceux qui ont mis une telle marque d’infamie sur le front du peuple turc…
Nazim Hikmet (considéré le plus grand poète turc de ‘900 )
Les procès contre les historiens et les intellectuels en Turquie et le film récent des frères Taviani : le Mas aux alouettes (traduit du roman homonyme de l’écrivain d’origine arménienne Antonia Arslan) ont contribué à réveiller l’intérêt du public italien concernant le génocide des chrétiens arméniens, perpétré par les turcs musulmans durant la première guerre mondiale.
Dans l’empire ottoman la population turque était relativement peu nombreuse considérant la présence d’arabes, de circassiens, de bédouins, de druses, de juifs et d’arméniens.
Les arméniens, tout comme les juifs qui vivaient sur les terres d’Israël (alors indiquées sur les documents de l’empire comme Syrie du sud), constituaient une élite de la société de cette époque.
Les arméniens étaient de grands travailleurs et de très bons agriculteurs et, grâce à leurs commerces ils étaient aisés et avaient l’expérience du monde. Ils étaient généralement cultivés et, au milieu de populations parmi lesquelles l’analphabétisme dépassait largement les 90 pour cent, ils envoyaient souvent leurs filles et leurs fils en Europe pour étudier et obtenir une licence.
L’élimination des arméniens arrive à cause de ce qu’on peut définir l’invention du génocide dans le sens moderne, quelque chose qui n’avait jamais existé auparavant et que Hitler, en ’39, indiqua comme exemple à ses hommes réunis, pour leur expliquer ce que seront ses projets dans le futur immédiat.
Non pas des tueries occasionnelles et des carnages comme ceux qui ont été perpétrés, avec l’accord plus ou moins tacite de la Sublime Porte, au cours des cinq siècles de domination turque, mais l’élimination d’une nation entière, planifiée et organisée rationnellement afin que la mort puisse être donnée d’une façon systématique et ordonnée.
Durant cinq années environ, au moins un million et demi de citoyens arméniens, probablement beaucoup plus, ont été éliminés.
Les hommes étaient fusillés dans les casernes où ils étaient convoqués pour le service militaire, ou bien ils étaient séparés de leurs femmes et de leurs enfants, conduits le long des routes à construire et après avoir terminé les travaux forcés ils étaient éliminés.
Les vieillards, les femmes et les enfants étaient déportés à Deir es Zor, l’entrée du désert Mésopotamienne. Après des marches exténuantes durant lesquelles beaucoup d’entre eux moururent, les survivants étaient abandonnés là pour mourir de faim et de soif.
En vérité il faut rappeler que quelques arméniens ont pu y survivre, grâce au bon cœur de turcs modestes qui, horrifiés par ces massacres, accueillirent des arméniens dans leur maison, pendant une période difficile. Les nouvelles lois punissaient le délit de pitié envers les arméniens, avec la prison et dans les cas les plus graves, la mort.
A la fin des années vingt un jeune tchécoslovaque, cultivé et raffiné, voyageait sur les territoires qui, une dizaine d’années avant, constituaient les confins de l’empire ottoman. A Damas il rencontra quelques gamins arméniens déportés, mutilés et très pauvres qui travaillaient comme esclaves dans les fabriques de tapis locaux.
Franz Werfel, un jeune européen, appris par eux beaucoup de ce qu’il était arrivé et grâce à eux il décida d’écrire son premier livre : Les quarante jours du Mussa Dagh.
Sur les cotes du Liban, au nord de la baie d’Antioche, près du golfe de Alexandrette s’élève le massif du Mussa Dagh dont le versant occidental est une falaise, une paroi rocheuse qui surplombe la mer ce qui fait de cette montagne une forteresse naturelle. Sur le versant oriental aux pieds de la montagne, au début du siècle, vivaient pacifiquement quelques milliers d’arméniens, répartis en sept villages.
Quand les informations sur la déportation devenaient de plus en plus fréquentes et qu’il n’était plus possible de fermer les yeux sur une réalité qui apparaissait être un destin inéluctable, la majorité de la population décida de ne pas s’y rendre, mais plutôt tenter une résistance.
A la fin du mois de juillet 1915, cinq mille arméniens, parmi lesquels trois mille composés de femmes, de vieillards et d’enfants se réfugièrent sur le sommet de la montagne avec des armes, des vivres, des outils et des troupeaux de moutons. Là, ils construisirent des cabanes et des tranchées et résistèrent ainsi pendant quarante jours aux assauts continuels de l’armée turque qui était la plus féroce et la plus puissante du monde. Ils résistèrent ainsi pendant quarante jours aux turcs qui bafouaient les arméniens comme de faibles commerçants et exaltaient eux-mêmes comme étant les guerriers les plus forts.
Pendant ces semaines-là, les arméniens trouvèrent une longue perche à laquelle ils fixèrent un drap blanc avec une grande croix rouge peinte au centre, ils disposèrent des banderoles sur les rochers en direction de la mer, sur lesquelles ils avaient écrit : « S.O.S Chrétiens en détresse ». Personne ne les aida. Lorsqu’ils furent affamés et à l’extrême de leurs forces, avec des centaines de morts parmi eux tués par l’épuisement ou par les soldats turcs, quand ils étaient juste sur le point d’être anéantis, les survivants furent sauvés en extremis par des paquebots français qui transitaient inopinément dans le golfe de Alexandrette.
Franz Werfel était juif et il deviendra par la suite un grand écrivain. En 1945, quand il avait seulement 55 ans, il mourut à l’improviste en Californie, en laissant incomplet son dernier livre. Il avait réussi à s’évader d’un camp de concentration allemand en France, avec l’aide d’un groupe de la Résistance locale.
Dans son premier roman il voulut raconter une épisode de la résistance arménienne et il le fit avec la sensibilité subtile d’un juif européen qui partage la souffrance humaine, qui sait établir un rapport de compréhension avec une autre minorité tout comme la sienne, toujours exposée à la brutalité des hommes et à l’incertitude de la vie.
Relire le livre à présent, écrit au début des années ’30 et publié en 1934 est une expérience impressionnante pour le lecteur contemporain.
Outre à apprécier la qualité de l’écriture, la finesse de l’introspection psychologique et la description détaillée d’une culture différente de la notre, nous sommes énormément frappés par l’étude de la logique froide de l’extermination, et page après page il est d’une lucidité que l’on peut définir prophétique. Ce qui est arrivé à un passé récent s’adapte à la perfection au futur horrible qui se préparait.
Les quarante jours du Mussadagh a été traduit en anglais et peu de temps après en hébreu. Le livre eut une énorme diffusion en Israël à cette époque soumise à un mandat britannique, à la fin de la première guerre mondiale.
Tous les jeunes juifs le lisaient et en discutaient, profondément impressionnés par la cruauté des turcs et par l’héroïsme de cette petite communauté chrétienne qui évoquait le souvenir d’une autre petite communauté, celle des juifs rebelles de Masada qui, des siècles avant, avaient choisi la résistance à tout prix. Ces rebelles, du haut de leur forteresse avait vu l’armée romaine renforcer leur siège pendant neuf longs mois et qui, privés de toutes les possibilités de fuite, avaient décidé de se suicider dans la lumière aveuglante que la Mer Morte reflétait. La mort était préférable à la perte de la liberté et à la cruauté des romains.
Il ne faut pas oublier qu’à la fin de la première guerre mondiale, les juifs de Yishuv (la communauté), ainsi s’appelait les habitants de la terre d’Israël, avaient décidé d’apprendre l’usage des armes, de fonder une force de défense exclusivement juive et de licencier les mercenaires bédouins, suspects et faux, qui jusqu’alors, avaient défendu les établissements agricoles contre les assauts des arabes.
Par la suite, la Haganà (la Défense), où beaucoup de jeunes juifs s’étaient enrôlés, porta sur ses épaules la responsabilité de la défense d’une communauté soumise à des agressions continuelles par des bandes arabes organisées par le grand mufti de Jérusalem, la suprême autorité politique et religieuse des musulmans palestiniens. Ces derniers, pendant les années trente recevaient des financements non plus seulement par les syriens et les libanais, mais surtout par des fascistes italiens et des nazis allemands, tous intéressés à rendre la vie difficile soit aux anglais soit aux juifs.
Les adolescents israéliens lisaient à cette époque les poésies de Garcia Lorca et de Pablo Neruda, ils lisaient les poésies de Rebecca, la poétesse du lac de Tibériade et tous lisaient aussi Les quarante jours du Mussa Dagh ; sans le savoir, mais peut être de quelque façon ils le pressentaient, leur futur se préparait, un futur terrible, pendant lequel il leur sera demandé d’énormes capacités de détermination, de courage et de générosité.
Ces jeunes « sabra » (juifs nés en Israël), précurseurs du type « soldat israélien » trouvaient dans les pages de Werfel un code éthique et ils étaient galvanisés par cette histoire pleine de douleurs, d’héroïsme, d’abnégation et de solitude.
La même solitude que les juifs avaient très souvent connue au cours de leur Histoire. Ils la connaîtrons à nouveau, de la même façon dans les années de la Shoah, durant la guerre d’Indépendance et l’assaut de Jérusalem.
Savoir que la vie de milliers de personnes dépend de toi, que tu n’aura aucune aide et que la responsabilité d’établir ce qui est juste de ce qu’il ne l’est pas sera seulement la tienne, savoir que tu es seul au monde et que personne ne répondra à tes invocations d’aide.
Werfel a écrit « …la vie, l’esprit et le corps de chaque homme étaient comme la nuit noire, où brillait seulement un point lumineux, insupportablement intense : pointer l’ennemi. Il n’y avait aucun commandant, aucun ordre, il y avait uniquement cette conscience pétrifiante : derrière moi, le champ ouvert, les femmes, les enfants, mon peuple !... »
Puis éclata la seconde guerre mondiale et les premières nouvelles d’extermination en Europe arrivèrent, incroyables, invraisemblables. A la fin de l’an 1941 la communauté juive de Eretz Israël vivait avec une anxiété qui allait jusqu’à la panique.
Les troupes germaniques envahirent l’Afrique du Nord sous le commandement de Erwin Rommel, le renard du désert, le feld-maréchal, ainsi surnommé pour son habilité militaire. Les Anglais étaient battus et se retiraient, à part quelques armées qui résistèrent encore en faisant office de bouclier en Egypte où la population arabe était pro-nazie.
A Jérusalem le haut commissaire anglais, informa sans détour Shaul Avigur, le commandant en chef d’ Haganà que, en cas d’une invasion allemande, les anglais s’occuperaient exclusivement du salut de leurs propres hommes et que, par conséquent, ils se retireraient sans bouger un doigt pour défendre la communauté juive contre les nazis et les arabes qui étaient sur le point de préparer un massacre.
Hagana élabora alors un plan pour exercer les jeunes troupes à une guerre sans espoir et étudia la possibilité de se réfugier sur le mont Ghilboa et encore plus loin, vers Beit Shean, mais la vérité était que le territoire était minuscule pour qu’il y ait eu une réelle possibilité de se retirer.
Le plan fut appelé « Mussa Dagh en terre d’Israël ».
Werfel a écrit : « …recevoir la grâce de la vie de la part des hommes, cela n’existe plus…il ne nous reste plus qu’à mourir…Mais comment mourir ?...cria le pasteur….Moi je sais comment je mourirai. Pas comme un agneau passif, pas sur la route principale qui conduit a Deir es Zor, pas dans la boue des camps de déportation, pas de faim ni d’épidémie fétide ; non, je mourirai sur le seuil de ma maison les armes à la main…Et avec moi mourra ma femme et la créature qui doit encore naître et qui est en elle !... »
« …Selon toute prévision humaine nous n’avons qu’à choisir entre deux façons de mourir, une mort rapide et digne en bataille ou une mort méprisable et terrible en nous faisant massacrer. Si nous nous rendons parfaitement compte de ceci et si avec le plus grand mépris nous choisissons la première solution, une mort digne, alors peut-être il se peut qu’il puisse arriver un miracle et nous ne mourront pas. Mais seulement alors on le saura, mes frères !... »
Et enfin le miracle arriva : Rommel fut battu à El Alamein par le général Montgoméry et les israéliens furent sauvés et purent dédier leurs énergies à de multiples tentatives de porter secours aux juifs d’Europe.
L’écrivain israélien Yoram Kaniuk, dans l’excellente biographie de Yossi Harel, raconte que le jeune commandant portait une Bible dans ses bagages, avec des fruits secs, du chocolat, les poésies de Nathan Alterman et les Quarante jours du Mussa Dagh.
Yossi, était un commandant de la marine clandestine israélienne de 1945 à 1947. Il porta hors d’Europe des milliers de juifs survécus aux camps d’extermination, en gouvernant de vieilles embarcations surchargées de réfugiés, à travers une mer infestée de mines là où les juifs en fuite des nazies, pendant les années de guerre, sont morts noyés par milliers sans que personne les ait secourus.
Le long du trajet il y avait une flotte puissante, 45 paquebots militaires modernes anglais appuyés par une escadrille de la RAF, composée de dizaines d’avions.
Le gouvernement de Sa Majesté était froidement déterminé à arrêter et à déporter les survivants dans de nouveaux camps de concentration pour empêcher par tous les moyens l’immigration en terre d’Israël et sauver ainsi les intérêts commerciaux avec les pays arabes.
Kaniuk raconte que Harel en guidant la Knesset Israel (Assemblée d’Irael) chargea 4000 survivants, en une nuit d’hiver de pleine lune. Tandis qu’il côtoyait silencieusement la cote turque, il ne pensait qu’à une chose, au milieu de ces réfugiés qui fourmillaient et de cette ferraille qui risquait à tout moment de couler ; il avait senti remonter à la surface les émotions de l’enfance et les sensations suscitées par le livre qu’il avait lu avec son meilleur ami. Il s’était mis à chercher avec l’aide de la « longue-vue » et des cartes nautiques, le sommet du Mussah Dagh, où avait résisté « un minuscule Etat militaire courageux et mort de faim », où avaient résisté des frères d’une autre période et d’une autre culture, privés de toute possibilité de choix, exactement comme lui à ce moment-là.
Il avait finalement réussi à l’apercevoir au loin, la montagne couverte de neige, haute de mille mètres au sud-est d’ Antioche, et la vision lui avait fait penser à la forteresse de Masada et aux Thermopyles où « peu résistait aux plus » sans avoir personne à qui demander une aide, un conseil et à lui-même, soldat qui se battait pour une cause perdue et qui était responsable de la vie de milliers de personnes qui se fiaient exclusivement à son habilité et à ses compétences.
Yossi était si jeune, l’un de tous ces jeunes des Services Secrets israéliens, qui portaient sur leurs épaules une très grande responsabilité par rapport à leur age, si bien que des hommes bien plus experts et plus exercés auraient pu s’épouvanter. Après la Knesset Israël, au mois de juillet ’47, Yossi était aux commandes du paquebot Exodus ’47 chargé de 4515 survécus. Il avait à peine vingt-huit ans.
Le paquebot Exodus devint un mythe et son histoire eut une résonance dans le monde entier, parce que les Anglais, se couvrant eux-mêmes d’infamie et de honte, le cernèrent avec 5 contre-torpilleurs et un croiseur qui l’éperonnèrent et l’attaquèrent avec des gaz lacrymogènes et des armes à feu, massacrant 3 personnes et blessant une centaine d’autres.
La bataille dura des heures, les réfugiés étaient désarmés et se défendaient désespérément presque à main nue avec des objets quelconques qu’ils réussissaient à ramasser.
Puis le médecin de bord, couvert de sang, déclara que les blessés risquaient de mourir par manque de transfusions, alors Yossi ordonna la reddition et obtint en échange quelques sacs de plasma.
Au port de Haïfa, sous les yeux horrifiés des membres de la délégation internationale de Unscop les passagers, épuisés, furent chargés sur des navires munis de cages en fer, blindés avec du fil barbelé.
Ils furent chargés sous les insultes, à coups de pieds et de matraques. Quelques-uns se jetèrent à l’eau tandis que d’autres hurlaient au milieu des femmes évanouies et d’ enfants piétinés.
Les Anglais déclarèrent qu’ils les auraient tous transportés au point de départ. Yossi, après avoir évité d’être mis aux arrêts, continua de travailler dans l’émigration clandestine. Les réfugiés furent transportés en Allemagne et débarqués à Hambourg tandis que résonnaient les marches militaires allemandes. Ils furent enfermés à peu de distance, dans le camp de prisonniers de Poppendorf, qui, deux ans avant avait été un camp de concentration nazie.
Ainsi l’Etat d’Israël se préparait à naître, se préparait à naître entouré d’ennemis, se préparait à résister et à résister encore…
Werfel a écrit : « Le cœur se serrait en pensant que le minimum d’échecs, d’insuccès, d’erreurs aurait conduit irrévocablement à la ruine. Pour le peuple de Damlagìk il n’y avait pas de grades intermédiaires, mais seulement de grandes victoires ou la mort ».
Anna Rolli (traduction de Alice Tachdjian)

V.V

 
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