24 04 2009 -La Suisse rapproche Turcs et Arméniens

DIPLOMATIE | Sous l.égide de Berne, Ankara et Erevan adoptent une «feuille de route» en vue de la normalisation de leurs relations.
© AFP PHOTO/THE WHITE HOUSE/PETE SOUZA | .Micheline Calmy-Rey et ses homologues arménien, Eduard Nalbandian (à g.), et turc, Ali Babacan (2e à dr.), accompagné du sous-secrétaire Ertugul Apakan (au c.), lors de leur rencontre avec Barack Obama, en marge du Forum pour l.Alliance des civilisations.
GABRIELLE DANZAS ISTANBUL | 24.04.2009 | 00:01


En toute discrétion, depuis des mois, la Suisse .uvre au rapprochement entre la Turquie et l.Arménie. Mercredi soir, une étape supplémentaire a été franchie. Dans un communiqué commun, les trois pays ont annoncé qu.une «feuille de route» avait été établie: «les deux parties ont accompli des progrès tangibles (.), elles se sont mises d.accord sur un cadre général pour aboutir à
une normalisation des relations bilatérales.»

Cette déclaration est intervenue quarante-huit.heures avant le 24 avril, date de commémoration du génocide arménien commis sous l.Empire ottoman en 1915. La Turquie refuse toujours de reconnaître le caractère génocidaire de ces massacres, mais elle s.est engagée dans un processus de réconciliation avec son voisin.

Réunions secrètes à Berne
Ankara et Erevan négocient un accord pour établir des liens diplomatiques et rouvrir leur frontière commune, fermée depuis 1993. L.an dernier, en mai et en juillet, des réunions secrètes entre les deux pays se sont déroulées à Berne.
Et à Istanbul, le 6 avril dernier, la conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey a confirmé le rôle de médiation joué par la Suisse. En marge du Forum de l.ONU pour l.Alliance des civilisations, elle a rencontré le président américain Obama ainsi que les chefs de la diplomatie turque et arménienne afin de soutenir les négociations en cours.

L.obstacle Haut-Karabagh
Les divergences entre la Turquie et l.Arménie sur le génocide arménien ne constituent désormais plus un obstacle à leur réconciliation. Mais elle se heurte au conflit du Haut-Karabagh. Cette province azerbaïdjanaise à majorité arménienne est occupée par Erevan. Ankara avait justement fermé sa frontière avec l.Arménie pour soutenir l.Azerbaïdjan, un pays allié turcophone. Hier, Bakou a réagi à la «feuille de route» établie par Ankara et Erevan en mettant en garde contre «de possibles tensions dans la région». Le porte-parole du Ministère des affaires étrangères a conditionné la normalisation des relations entre la Turquie et l.Arménie à «un retrait des forces arméniennes des territoires occupés en Azerbaïdjan». En avril, le président azerbaïdjanais, Ihlam Aliev, avait même menacé de stopper l.approvisionnement en gaz de la Turquie si elle ne prenait pas en compte les intérêts de son pays.

Du côté turc, cette position azerbaïdjanaise trouve de nombreux soutiens, notamment dans les partis nationalistes, opposés à la politique d.ouverture conduite par le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan. Sous le feu des critiques, ce dernier a assuré, mercredi, qu.il n.était pas question «d. abandonner nos frères azéris». Mais un règlement de ce conflit larvé dans le sud du Caucase, héritage de la guerre froide, pourrait à son tour intervenir.

Hier, le président arménien, Sarkissian, se trouvait à Moscou où il a rencontré son homologue russe Medvedev, qui soutient une solution négociée pour le Haut-Karabagh. Ce dernier a déclaré que les discussions allaient dans «la bonne direction». Et le 7 mai, Sarkissian et Aliev devraient se retrouver en Suisse pour tenter de s.entendre sur le futur statut de la province litigieuse..

L.inquiétude des Arméniens de Suisse

«En soit, le rapprochement entre l.Arménie et la Turquie ne peut être que bénéfique. Mais nous sommes inquiets, car nous ne connaissons pas le contenu exact des négociations. Et nous ne pouvons en aucun cas accepter que la revendication de la reconnaissance du génocide de 1915 soit sacrifiée sur l’autel de la réconciliation», explique Raffi Garibian. Le porte-parole de la Communauté arménienne de Suisse affirme également que «l.annonce de l.existence d.une feuille de route vingt-quatre.heures avant la journée de commémoration du génocide est une man.uvre d.Ankara pour affaiblir le message de cérémonies. Or, nous, la diaspora, qui sommes les descendants des survivants, nous ne pouvons tolérer que l.on essaie d.effacer le souvenir de la planification de l’élimination systématique et méthodique d.un peuple.»

G..K.

G.C.