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06 12 18 - Petition - CHP may be excluded from the International Socialist ??!!
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REVUE DE PRESSE
La frustration et le dépit des citoyens turcs
dimanche 17 décembre 2006, Stéphane/armenews
http://www.humanite.presse.fr/journal/2006-12-15/2006-12-15-842275
Union européenne . Alors que démarre un sommet gelant en partie le processus d’adhésion de leur pays, les Turcs s’estiment victimes d’une décision injuste. Reportage.
Istanbul, envoyée spéciale.
Déception, découragement, amertume, parfois même colère, telles sont les réactions que suscite dans l’opinion publique turque la décision européenne de geler - partiellement, sur certains chapitres, les négociations en cours depuis un an pour l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Seuls les nationalistes, malheureusement de plus en plus nombreux à droite comme à gauche, se frottent les mains de voir que « le train de l’Europe freine ». Les « pro-européens » les plus convaincus, au contraire, poussent un ouf ! de soulagement : « Le train freine, mais il poursuit son chemin », titrait hier le journal Radikal (centre gauche), rappelant que, de toute manière, le processus d’adhésion est « une longue marche » qui a connu et connaîtra encore des hauts et des bas, la Turquie ne pouvant espérer intégrer l’UE avant quinze ans au moins.
encore quinze ans d’attente
Mais il est un sentiment unanimement partagé, celui que le premier ministre Erdogan a bien exprimé mardi soir devant le groupe parlementaire de son parti, l’AKP (1), qui, depuis son arrivée au pouvoir en 2002, a fait de l’adhésion à l’UE l’alpha et l’oméga de son programme : « Cette décision, a-t-il dit, est injuste pour la Turquie qui a multiplié les gestes de bonne volonté. »
Ce sentiment d’injustice, très largement répandu, ne tient pas tant au fait que l’UE exerce des pressions sur le gouvernement turc, mais à la manière de faire et à la raison mise en avant : le problème de Chypre. Car s’il est un domaine où l’AKP s’est distinguée des forces politiques classiques, c’est bien celui-là. « Nous refusons une politique nationaliste à l’égard de Chypre et nous avons soutenu le plan de réunification de l’ONU, que la partie grecque a rejeté », rappelle Ayse Bölhurer, jeune femme récemment promue à la direction de l’AKP (lire ci- dessous) : « Nous sommes déçus de voir que l’UE, au lieu d’oeuvrer en faveur de la réunification souhaitée par l’ONU, soutient le nationalisme grec. »
« Les Grecs, qui ont rejeté le plan Annan (2), sont primés et les Turcs, qui l’ont approuvé, sont réprimés », résume Bulent Akarcali, ancien ministre et ancien président de la commission mixte Turquie Parlement européen : « C’est pure hypocrisie de l’UE, qui cherche un alibi pour retarder, voire annuler l’adhésion de la Turquie. La vérité, c’est que certains États, comme la France, l’Autriche, l’Allemagne ou le Danemark, sont gangrenés par le racisme et que certains dirigeants comme Sarkozy ou Merkel ont fait de nous leur tête de turc... »
54 % de la population souhaite l’adhésion
Répercussion directe de cet état d’esprit dans les sondages : 40 % des citoyens turcs pensent que leur pays entrera dans l’Union européenne (contre 70 % il y a dix ans), même s’ils sont encore 54 % à souhaiter cette adhésion. Pour le professeur Suheyl Batum, recteur de l’université Bahçesehir à Istanbul, ces chiffres reflètent « plus une frustration qu’un rejet ». « Une bonne partie de la population a le sentiment que l’Europe ne veut pas de nous, se moque de nous et nous méprise, dit-il. En fait, les gens demandent que l’Europe soit claire : si on ne veut pas de nous, qu’on le dise tout de suite, mais qu’on cesse de chercher des prétextes. »
besoins de réviser la Constitution
Comme beaucoup d’autres intellectuels turcs, Suheyl Batum regrette que l’Union européenne « ne se préoccupe pas suffisamment des dossiers qui font réellement problème dans le processus de démocratisation qu’a entamé la Turquie en se tournant vers l’Europe ». Pour ce constitutionnaliste de renom, l’un des plus graves concerne « l’absence d’indépendance de la justice, qui nécessiterait une révision profonde de la Constitution » : « Par exemple, le recteur de l’université de Van (Kurdistan - NDLR) a été emprisonné pendant 65 jours. Tous les autres recteurs sont allés le défendre, mais pas un représentant de l’UE n’a bougé le petit doigt... »
Hayri Kozanoglu, le président du Parti de la liberté et de la solidarité (ODP), est encore plus sévère à l’égard de l’Union européenne : « Nous souhaitons certes adhérer à l’UE, mais pas celle de la stratégie de Lisbonne et de la constitution néo-libérale que la France a rejetée. Cette UE là manque de plus en plus de cohérence et constitue de moins en moins un modèle démocratique à nos yeux. Elle critique la Turquie sur Chypre, mais elle se tait quand le gouvernement n’applique pas la charte sociale européenne, qu’il a pourtant signée. »
Gengis Aktar, économiste, professeur d’université, estime pour sa part que le gouvernement turc porte sa part de responsabilité dans la crise actuelle : « Depuis deux ans, ils n’ont rien fait pour faire avancer les dossiers pointés par la Commission, comme la justice ou les droits des minorités. On est même revenu en arrière dans des domaines comme la liberté d’expression, avec l’adoption de l’article 301 qui aboutit à des procès contre des écrivains, des journalistes accusés de "diffamer l’identité turque". Il s’agissait de ménager les nationalistes, mais ce calcul tactique s’est transformé en erreur stratégique : si on avait continué d’avancer sur tous ces dossiers, on aurait des arguments pour contrer l’offensive des anti-Turcs en - Europe. »
les nationalistes en embuscade
Une offensive qui, compte tenu des échéances électorales, risque de se poursuivre en France, au plus grand bénéfice des nationalistes turcs et de l’armée, toujours en embuscade pour défendre un pouvoir qui reste grand, même si le gouvernement AKP l’a un peu écorné. Car il y a aussi, l’an prochain, des élections en Turquie : présidentielle en avril et législatives en novembre. On prête déjà à Erdogan l’intention de se présenter à la première - c’est l’Assemblée, où il dispose d’une majorité écrasante, qui élit le président - et à l’armée celle de l’en empêcher. Quant aux secondes, le MHP (ex-parti d’extrême droite fasciste des Loups gris) et le CHP (parti social-démocrate devenu ultra-nationaliste au point qu’une pétition circule pour le faire exclure de l’Internationale socialiste) pourraient s’y allier pour faire échec à l’AKP, en surfant sur la vague nationaliste qu’encourage l’attitude de l’Europe.
(1) L’AKP se définit comme un parti libéral démocratique respectueux de la tradition musulmane turque et se compare aux partis chrétiens-démocrates européens.
(2) Le plan Annan de réunification de Chypre a été approuvé par référendum par la partie nord, occupée depuis 1974 par 40 000 militaires turcs, et rejetée par la partie grecque, qui a malgré cela intégré l’Union européenne en 2005.
Françoise Germain-Robin
V.V
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